Mathilde MODERNE
a soutenu sa thèse de doctorat
le 11 décembre 2025
Ingénierie de matériaux 2D fonctionnalisés pour des membranes avancées : de la fonctionnalisation chiriale aux architectures hybrides de diodes nanofluidiques pour le traitement de l’eau
Devant le jury composé de :
– Brigitte VIGOLO, Chargé de recherche, CNRS-Université de Lorraine – Rapporteur
– Jean-Christophe GABRIEL, Directeur de recherche, CEA-Université Paris-Saclay – Rapporteur
– Aldo Jose Gorgatti ZARBIN, Professor, Federal University of Paraná – Examinateur
– Eric ANGLARET, Professeur, Université de Montpellier – Examinateur
– Sébastien BALME, Maître de conférence, Université de Montpellier – Directeur de Thèse
– Damien VOIRY, Directeur de recherche, CNRS-Université de Montpellier – Co-directeur de Thèse
– Chrystelle SALAMEH, Maître de conférence, Ecole Nationale Supérieure de Chimie de Montpellier – Encadrante
Résumé :
Dans un contexte mondial marqué par une crise persistante de l’accès à l’eau potable, environ 26 % de la population n’a toujours pas accès à une eau de qualité, tandis que 46 % ne bénéficient pas d’un système d’assainissement sécurisé. Paradoxalement, dans les régions disposant d’infrastructures avancées, plus d’un tiers de l’eau potable est consommé par les secteurs agricole, industriel et domestique, accentuant la pression sur cette ressource. Parmi les principales sources de pollution, les rejets industriels représentent près de 20 % des eaux usées, avec une proportion croissante de micropolluants émergents notamment des composés pharmaceutiques issus d’activités domestiques et industrielles responsables d’environ 10 % de cette contamination. Ces substances constituent une menace croissante pour la santé humaine et les écosystèmes, rendant essentiel le développement de procédés de traitement à haute performance et durabilité.
Face à ces enjeux, le traitement des eaux polluées et le dessalement des eaux salines apparaissent comme des leviers stratégiques pour les décennies à venir. Les membranes de séparation occupent une place centrale dans ces technologies, notamment pour la purification de l’eau. Cependant, les membranes polymères conventionnelles se heurtent à un compromis fondamental entre perméabilité et sélectivité, limitant leurs performances. La mise au point de matériaux innovants capables de concilier ces deux critères représente dès lors un axe prioritaire de recherche et un enjeu scientifique majeur. Les nanomatériaux bidimensionnels (2D), organisés en structures laminaires formant des nano-canaux, suscitent un intérêt croissant en raison de leurs propriétés exceptionnelles : grande surface spécifique, densité fonctionnelle élevée, épaisseur contrôlable jusqu’à l’échelle nanométrique et effets de confinement moléculaire. Ces caractéristiques ouvrent de nouvelles perspectives pour la séparation membranaire et la nanofluidique.
Cette thèse s’inscrit dans cette dynamique et explore la conception de membranes avancées fondées sur des matériaux 2D ainsi que les mécanismes de transport à l’échelle nanométrique. La première partie du travail a été consacrée à la fonctionnalisation de monocouches de MoS2 synthétisées par dépôt en couches atomiques (ALD), via le greffage contrôlé de molécules chirales sur leurs deux faces. Cette approche a permis d’élaborer des nanostructures Janus-2D chirales et d’étudier les mécanismes d’induction de chiralité dans des matériaux bidimensionnels, en lien avec la rupture de symétrie intrinsèque et les propriétés physico-chimiques de surface, ouvrant ainsi la voie à la conception de membranes chirales destinées à la séparation énantiomérique.
La seconde partie a ainsi porté sur l’élaboration de membranes chirales nanolamellaires à partir de nanofeuillets de MoS2 exfoliés chimiquement, dans le but d’améliorer la sélectivité énantiomérique et de réduire la présence de polluants pharmaceutiques dans les eaux usées, enjeu majeur pour la dépollution sélective.
Enfin, une approche complémentaire a consisté à concevoir un dispositif membranaire hybride intégrant des monocouches 2D au sein d’une architecture supportée par une membrane de polyéthylène téréphtalate (PET) nanostructurée par irradiation (track-etched). En présentant à la fois des propriétés de rectification ionique et de sélectivité cationique, ce système ouvre la voie au développement de dispositifs hybrides de dessalement, plus efficaces et moins énergivores.
L’ensemble de ces travaux apporte des preuves de concept essentielles pour le développement de membranes intelligentes et multifonctionnelles, conçues pour répondre aux défis environnementaux contemporains liés à la gestion durable des ressources en eau.








